Les caractéristiques d’une Société Civile Immobilière (SCI) lui confèrent des possibilités extrêmement intéressantes pour optimiser la transmission de son patrimoine sans passer par la case impôt sur la donation ou la succession, ou du moins, en réduire considérablement le montant!
Cet article traite des techniques les plus courantes de transmission utilisant une SCI, et non de l’ensemble des cas possibles qu’il serait très complexe de lister de manière exhaustive.
Pour bien comprendre le présent article, certaines notions décrites dans un précédent article, traitant des stratégies d’exonération des droits de succession hors SCI, vous seront très utiles, je vous invite donc à le lire avant de poursuivre sur celui-ci!
Dans tous les cas, il conviendra de consulter un notaire pour vous informer précisément de vos droits et devoir en terme de succession.
1) Une SCI permet de profiter de l’intégralité des abattements successifs lors des donations du vivant!
Une SCI ou société civile immobilière est un contrat de société par lequel plusieurs personnes (les associés) décident de mettre en commun un ou plusieurs biens immobiliers afin d’en partager les bénéfices ou de profiter de l’économie qui pourrait en résulter, tout en s’engageant à contribuer aux pertes.
En terme de gestion de patrimoine sur le long terme, on a toujours intérêt à scinder en plusieurs fois la transmission pour profiter plusieurs fois des abattements de transmission qui se renouvellent actuellement tous les 15 ans (l’Etat pouvant modifier cette temporalité à tout moment).
Si la transmission se fait sans SCI, de manière classique avec des appartements, des maisons ou des immeubles, il est difficile de réaliser des donations qui correspondent « pile-poil » aux abattement.
Dans le cas d’une SCI, dont le capital est divisé en parts, on peut donc transmettre son patrimoine progressivement et adapter la valeur de la transmission à celle de l’abattement!
Par exemple, M. Durant possède un appartement de 150 000 € qu’il souhaite donner en donation du vivant à son fils. Déduction faites de l’abattement forfaitaire de 100 000 €, la base imposable est de 50 000 € et le fils de M. Durand va donc payer 8194 € de droit de donation.
Si M. Durant intègre le bien dans une SCI, il peut très bien transmettre à son fils un nombre de part correspondant au montant de l’abattement (100 000 €) et conserver le reste, ce qui évite de passer à la caisse!
Il pourra ainsi renouveler l’opération dans 15 ans pour faire une nouvelle donation totalement exonérée d’impôt sur un autre bien ou sur les parts restantes du premier.
2) La SCI permet de réduire les droits de donation via la déduction des dettes liés aux bien (crédit immobilier)
En matière de succession et de donation, les dettes liées à un bien acheté en nom propre ou en indivision ne peuvent pas toujours être déduites de la valeur de ce bien pour le calcul des droits (impôt sur la succession ou la donation).
C’est là que la SCI est intéressante, car si le bien est possédé par une société civile, la valeur des parts sociales tient compte du passif supporté par la société. Autrement dit, la dette correspondant au montant du capital restant dû du crédit immobilier ne sera pas pris en compte dans le calcul de la base imposable des droits de succession ou donation!
Pour mieux comprendre, voici un exemple :
M. Dupont achète un appartement de 400 000 € en empruntant 200 000 €. S’il fait une donation à ses enfants, les droits seront calculés sur une base de 400 000 €.
Si M. Dupond crée une SCI au capital de 200 000 €, qui emprunte 200 000 € pour acheter l’appartement, alors les parts valent schématiquement 200 000 €. C’est donc sur cette valeur que seront calculés les droits de donation si M. Dupont transmet ses parts après avoir intégré ses enfants à la SCI, donc une forte diminution des droits de succession en comparaison au don qui serait fait en nom propre.
3) Créer une SCI familiale pour transmettre une fraction du patrimoine locatif aux enfants tout en gardant l’usufruit, tout en évitant l’impôt sur la donation ou la succession
Dans le cas d’un patrimoine comportant plusieurs biens immobiliers, la stratégie du démembrement vue précédemment peut s’avérer laborieuse car il faut l’appliquer sur chaque bien. Dans le cadre d’une SCI, une fois les règles de démembrement des parts posées, que vous ayez un seul bien ou plusieurs au sein de la SCI, le travail est déjà fait.
Prenons l’exemple de M. Dupond, qui à 62 ans, possède un patrimoine immobilier locatif de 300 000 €. Il souhaite effectuer la transmission de son patrimoine locatif mais ne souhaite pas se priver de ses loyers qui sont pour lui un bon complément de retraite ! Pour ce faire, il peut transmettre uniquement la nue-propriété de ses biens.
Du fait de son âge (moins de 70 ans), la nue-propriété sera évaluée à 60 % de la valeur des biens.
La structure juridique la plus adaptée pour l’opération est une société civile immobilière qui va intégrer les bien locatifs.
Une fois la SCI créée par M. Dupond et ses deux enfants, celui-ci y apportera la pleine propriété des biens locatif, puis les parts seront « démembrées » afin que la nue-propriété puisse être attribuée aux enfants.
Le père conservera l’usufruit, ce qui en conséquence directe lui permettra de continuer à percevoir les loyers.
Notez que M. Dupond doit conserver une part en pleine propriété et s’inscrire comme gérant statutaire de la SCI pour rester maître de la gestion de son patrimoine.
La nue-propriété des biens étant évaluée à 60% de sa valeur de 300 000€ , soit 180 000 €, ce montant est réparti à part égale entre les deux enfants, soit 90 000 € par enfant.
Compte tenu de l’abattement de 100 000 € par enfant, les enfants ne payent pas de droit de donation.
Notez que si les enfants devaient payer un droit de donation, dans le cas d’une part plus importante et supérieure à l’abattement de 100 000 €, M. Dupond peut tout à fait prendre le montant de cet impôt à sa charge.
Au 77 ans de M. Dupond, c’est-à-dire 15 ans après la première donation via la SCI, les enfants rechargent en quelque sorte leurs abattements de 100 000 € dont ils pourront bénéficier, le cas échéant, lors d’une seconde donation.
Au moment de la succession, les enfants récupéreront la pleine propriété des biens immobiliers locatifs de la SCI sans droits supplémentaires à payer ! En effet, la part d’usufruit qui leur revient au moment de la succession, ne passe pas, dans le cas d’un démembrement, par la case impôt.
Notez tout de même que la création d’une SCI peut couter entre 3000 et 5 000 € pour la rédaction de l’acte et l’enregistrement des statuts auprès du notaire.
4) La SCI permet une transmission astucieuse et avantageuse fiscalement entre concubins et une protection efficace du survivant par démembrement croisé des parts
Si l’on applique la stratégie de démembrement au sein d’une SCI entre concubin, cela revient au même avantage fiscale que vu précédemment dans le cas d’une donation de parents à enfants.
Par exemple, si M. Dupont et Mlle Martin constituent une SCI en se répartissant l’usufruit et la nue-propriété de 100 parts, M. Dupont prend l’usufruit des parts 1 à 50 et la nue-propriété des parts 51 à 100, tandis que Mlle Martin prend l’usufruit des parts 51 à 100 et la nue-propriété des parts 1 à 50. Au décès de M. Dupont, Mlle Martin héritera de la pleine propriété des parts N°1 à 50 (sans payer de droits de succession) et conservera l’usufruit des parts 51 à 100, dont la nue-propriété sera répartie entre les héritiers de M. Dupont. Elle pourra donc conserver la pleine jouissance du logement, c’est à dire l’occuper ou le louer, jusqu’à son décès. Et vice-versa, si c’est Mlle Martin qui décède avant Monsieur Dupont.
5) Une décote de 10% pour les SCI !
Les parts d’une société civile immobilière présente l’avantage de pouvoir faire l’objet d’une certaine décote (environ 10%) par rapport à la valeur des biens qu’elle possède, au motif qu’il est beaucoup plus difficile de vendre ces parts que ces biens.
Par conséquent, il en résulte une diminution de l’assiette de calcul des droits de donation ou de succession, donc une diminution de l’impôt!
6) Cerise sur le gâteau !
D’après l’arrêt du 10 février 2009 de la Cour de cassation, la SCI devient un moyen encore plus efficace de transmettre les fruits de son patrimoine avec une totale exonération de droit de succession.
En effet, des parents peuvent décider d’associer leurs enfants à la SCI en utilisant le démembrement des parts, l’usufruit revenant aux parents et la nue-propriété aux enfants, tout en affectant le résultat de la société en réserve. Ainsi, pendant le temps de la gestion par les parents, ceux-ci ne touchent pas de loyers, ces derniers étant en réserve.
Cette stratégie permet de capitaliser les revenus (loyers) dans la société sur plusieurs années de façon totalement défiscalisé pour la succession car la réserve n’est pas soumise aux droits de succession !
Il convient en revanche de respecter scrupuleusement les critères posés par la Cour de cassation : les assemblées doivent se tenir tous les ans et être consignées dans le registre officiel des délibérations. Le résultat doit être affecté en réserve et non au compte courant d’associé des usufruitiers car ces derniers empêcheraient toute exonération, ce compte courant devant être déclaré au moment de la succession des parents.